Page:Leo - Attendre - Esperer.djvu/36

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

testa. Elle était sincère et ne posait pas, cette jeune femme, quand, se croyant bien seule avec son enfant, sous les genêts, elle avait donné de l’amour une définition si pure, supérieure assurément à celle du bon Dieu.

Eh bien !… quoi ?… était-ce une raison pour ne plus penser qu’à cela, comme si c’était le moins du monde l’affaire du docteur Émile Keraudet la manière dont la baronne ou marquise de Carzet comprenait l’amour ? Cette femme avait une grande valeur, soit ; mais elle n’en était sans doute que plus fière et plus hautaine. Et tenez, vraiment, n’était-ce pas avec une royale impertinence, impertinence, oui, certainement, qu’elle l’avait invité, lui jeune homme, que l’on ne tenait point d’habitude pour indifférent, à les venir voir ? Une autre femme eût éprouvé quelque embarras d’une pareille invitation et, plutôt en eût laissé le soin à son père. Mais elle n’avait pas même paru songer à cela. N’était-ce pas dire : J’habite une sphère où vos vœux ne peuvent atteindre ; vous n’êtes point un homme pour moi.

Ô race incorrigible et que nul enseignement ne peut guérir de la lèpre d’orgueil infuse dans son sang ! Il n’y a que de telles femmes pour être arrogantes avec tant de grâce et d’apparente candeur !

Mais il n’était pas d’humeur à se laisser prendre à de tels appeaux ; il n’entendait pas aider le baron et sa fille à se poser en bienfaiteurs du canton, à ressaisir moralement ce rôle de suzerains qui, par le tribut de toutes les bénédictions, remettrait dans leurs