Page:Leo - Attendre - Esperer.djvu/31

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

décidait en de pareilles conditions, ne serait pour lui qu’un plus profond assoupissement, et le bonnet de coton destiné à couronner le plat édifice de sa vie.

Sur toutes ces réflexions, il se décidait parfois à partir le lendemain. Seulement, dès que ses yeux rencontraient le doux visage de sa mère, où le bonheur maternel avait remplacé les pleurs du veuvage, il sentait sa résolution s’évanouir, et remettait la chose à plus tard. Se plaçant alors à un autre point de vue, il se rappelait tant de mécomptes, de trahisons, de dégoûts qu’il avait éprouvés dans ce Paris, où souvent les passions, et surtout les bassesses, dépouillent toute pudeur. Il se rappelait combien dans ces foules il avait trouvé parfois la solitude amère et profonde ; il comparait ce foyer banal, tarifé, mal entretenu par des mercenaires pillards, ce milieu où rien ne se donne, où tout se vend, et surtout l’amour, à son logis si ouaté de confort, si intime, si large et si chaudement vivifié par une pure tendresse.

Après tout, s’il ne pouvait plonger son esprit dans les eaux jaillissantes des libres discussions, des neuves théories, des étincelants paradoxes, s’il ne respirait pas de cette respiration haletante de la grande cité, les journaux, les revues, les livres nouveaux le faisaient participer de loin à la vie générale du monde entier, et de toutes ces passions et de toutes ces fièvres ne lui apportaient que le résultat le plus calme et le plus sain… Tout cela considéré, il soupirait encore ; c’était pré-