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Mais ces deux étrangères, il les vit à peine. Toute curiosité à leur égard avait fait place aux préoccupations du médecin devant un être en danger. Il s’assura que la pauvre femme était seulement évanouie, versa entre ses lèvres quelques gouttes d’un cordial qu’il avait sur lui, et dit à la personne qui se trouvait là :

— Courez au moulin, madame, et faites-vous entendre de l’homme qui le fait mouvoir. Montez, s’il le faut, l’échelle ; il nous faut quelqu’un.

En même temps, il enleva dans ses bras la malade et marcha vers le moulin, précédé par la jeune femme, qui d’une course rapide atteignit bientôt la tourelle. Quant au docteur, il entra dans la maison, déposa la meunière sur son lit, et palpa le pouls en considérant avec attention cette pâle figure exténuée où tout exprimait l’épuisement, le lent retrait des forces vitales.

Quelques minutes après, la jeune femme rentrait, accompagnée de sa fille, qui se pressait contre elle, et dont les yeux grands ouverts témoignaient de cet ébahissement que font éprouver aux enfants les accidents sérieux de la vie, et dans lequel domine surtout la curiosité.

— L’homme vient, dit la jeune dame.

— Il devrait être ici en même temps que vous, dit le docteur ; mais je réponds qu’il en a pour quelques minutes encore. Les choses avant les personnes. Ils sont tous ainsi.

Il chercha du regard autour de lui.

— Que vous faut-il, monsieur ? demanda l’inconnue.

— Du vinaigre ; mais je ne sais…