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accordées et reprises, ces fluctuations constantes, était-ce coquetterie ? Non ; il suffisait de la voir pour rougir d’une pareille pensée, tant il y avait dans cette jeune et belle créature de sincérité visible. On eût dit plutôt qu’une vague inquiétude la dominait, que des sentiments contraires s’agitaient en elle.

À son tour, elle leva les yeux sur Émile, dont le visage exprimait une mortelle angoisse, et, par un mouvement rapide, cueillant une autre fleurette, elle la lui remit avec un charmant sourire.

Mais comme il la remerciait avec chaleur, le correctif revint :

— Puisque vous aimez tant les fleurs, dit-elle.

Émile retrouva naturellement la réponse naïve :

— Ce ne sont pas les fleurs que j’aime.

— Ah ! dit-elle ; et sous prétexte de rappeler Marthe, qui déjà les avait quittés, elle s’échappait ; mais il la retint résolument. Il en était arrivé à cette tension de l’esprit où le pire mal devient l’incertitude.

— J’aime tout, reprit-il, ou je n’aimerai plus rien. Toute mon âme est près de se fondre dans une adoration infinie, ou de s’abîmer dans le désespoir. Choisissez pour moi. Je vous aime ! je vous aime ! vous le savez bien. Parlez !

Il la vit toute tremblante, pâle.

— Oh ! dit-elle douloureusement, pourquoi m’aimez-vous ainsi ? Pourquoi voulez-vous nous séparer ? J’aurais été si heureuse de vous avoir pour ami !