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par l’effet de cette lâcheté qui évite de s’attaquer aux personnes présentes, surtout quand ces personnes possèdent des prestiges, bien autrement puissants que l’honnêteté, pour commander le respect aux âmes viles.

Mme de Carzet n’en perçut que l’accent et le murmure, et reçut l’impression d’une méchanceté sans en démêler le sens ; mais Émile plus proche, avait saisi les odieuses paroles, et le regard qu’il lança à la vieille fille tout en la réjouissant du succès de sa malice, l’effraya. Ramassant à la hâte les débris de sa laine et saluant Mme de Carzet, qui lui rendit froidement son salut, Mlle Chaussat se hâta de s’éloigner, non sans avoir lancé de haineux regards à Sapajou.

Cette désagréable rencontre avait ramené de très-haut l’esprit de nos promeneurs, et tous deux se sentant froissés de leur chute. Émile éprouvait une profonde irritation, non-seulement de l’espionnage dont il était l’objet, mais de voir Mme de Carzet exposée, à cause de lui, à de sots et méchants propos. C’était un motif de plus pour hâter une explication qui, d’une façon ou de l’autre, devait les terminer ; mais, arrivé à ce moment terrible où un mot allait décider de son bonheur ou de son malheur, le cœur étreint jusqu’à la souffrance, Émile restait sans paroles. Quant à Mme de Carzet, elle paraissait troublée.

Évidemment l’apparition de Mlle Chaussat au milieu de leur idylle et l’air perfide et hostile de cette digne personne faisaient réfléchir la jeune femme au plus ou moins de convenan-