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Il y a dans l’histoire, en dépit de la pression des lois et des mœurs, de grands caractères de femmes ; j’en connais moi-même d’admirables, et je trouve que la force d’âme et l’intelligence sont bien partout où elles sont.

— À Dieu ne plaise, dit Germain, que je nie cet héroïsme du dévouement qui est l’apanage de la femme, et qui à certains moments l’élève au-dessus de sa faiblesse. La femme est une inspirée. C’est la sibylle, le trépied, d’où sortent parfois les révélations de l’inconnu. Par sa nature éminemment nerveuse et fébrile, elle saisit ce qui échappe aux sens moins subtils de l’homme, plus haute et plus basse à la fois, tantôt prosaïque et tantôt sublime, saisie parfois d’enthousiasmes irrésistibles, parfois de terreurs absurdes, rarement ou jamais dans le milieu réel, harmonique et fort…

— Et moi, s’écria d’un ton naïf la jeune fille, et moi qui jusqu’ici avais cru faussement que j’étais femme ! »

M. de Maurignan se mit à rire.

« Me voilà déclassée, père. Que deviendrai-je ? Car je ne puis ni me disloquer, ni mentir, afin d’entrer dans ce cadre fait pour la vraie femme, celle de la mesure prescrite et de l’étiage officiel. Quel Procuste vous êtes ! poursuivit-elle en tournant vers Germain un visage où, sous la malice et l’ironie, rayonnait une flamme plus pure. Et de quel droit, bon Dieu ! nous classer ainsi, comme une flore nouvellement découverte, dans vos tiroirs ? J’ai apporté ma part de libre souffle en ce monde et j’en veux user à mon gré. Vous oubliez, dans votre fureur d’analyse et de dissection, que la simple nature elle-