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pour ne pas entendre ; mais en vain, et de tous ces souvenirs, le dernier, le plus odieux, le monstre que surtout elle redoute, et devant lequel sa pensée défaillante recule, ainsi qu’un enfant devant le spectre de sa peur, — celui-là vient à son tour, l’atteint et la glace de son étreinte… Elle entend ces paroles d’amour prononcées pour une autre qu’elle, les mêmes, ô honte ! que tout à l’heure… et derrière la vitre lui apparaît encore ce visage, où elle ne reconnaît qu’avec horreur un être adoré.

En proie à des souffrances nerveuses, éplorée, haletante, dans l’atmosphère encore lourde qui avait succédé aux chaleurs du jour, elle détacha sa robe, Ôta son corset et se jeta dans un fauteuil, près de la fenêtre ouverte, où de légers souffles, agitant les rideaux de mousseline, apportaient du jardin la senteur des pois parfumés et des chèvre-feuilles. Elle pencha sa tête brûlante sur son beau bras nu ; sous la batiste bordée de dentelle, son jeune sein s’élevait et s’abaissait tour à tour, par les spasmes irréguliers de ses sanglots et de ses soupirs. Une larme de temps en temps, se détachant des cils, roulait sur sa joue. Par l’entrebâillement des rideaux, qu’écartait la brise, on apercevait sous le ciel étoilé, dans le jardin, de sombres masses de verdure endormies ; le regard d’Aline s’y attachait vaguement, sondant l’inconnu, l’espace, et se répétant sans cesse une seule question : Où est-il ?

De plus en plus, cette inquiétude la dévorait, quand tout à coup, avec la finesse d’ouïe particulière à ceux qui attendent, elle entendit un pas sur les dalles du corridor, à l’autre bout, où se trouvait la chambre de Paul. C’était le sien. Elle frémit