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étourdie de ma chute, je doutais encore ; je voulus savoir, et pris cet habit, sous lequel tout aussitôt l’impureté vint à moi, me fit fête et me promena dans son palais.

Ce que j’ai vu sous mes yeux, ce que d’odieuses confidences ont appris à mon oreille, ce qu’il m’a été donné de découvrir d’infamie, de lâcheté, d’abjection, dans ce monde où mon pied ne s’est posé qu’en passant, à jamais, vois-tu, mon âme en sera troublée. Je suis comme un voyageur qui, s’approchant d’une source pour y boire, la voit remplie d’immondices, au milieu desquelles nagent des reptiles affreux ; il fuit, pénétré d’un tel dégoût, que sa soif se trouve éteinte, sans avoir été satisfaite. Dans ce temps-là, tu m’accusais de mélancolie. J’endurais une souffrance extrême. Personnelle ? oui, sur un point où sans doute elle fut plus intime ; mais, à l’égard des choses en elles-mêmes, quoique désintéressée, non moins âpre. Le spectacle journalier de ce viol odieux, insensé, de l’être moral, qu’ils nomment leurs amours ; l’âme de la femme atrophiée par leurs systèmes, avilie par leurs injures, étouffée sous leurs baisers ; sa honte et sa misère, fruit de leurs joies ; eux-mêmes, au cœur des plus nobles dons de l’intelligence et de la bonté, nourrissant le ver de l’illogisme et de l’injustice, tout cela me jetait en des fièvres d’indignation et de douleur. J’eusse laissé là promptement cette horrible étude, si j’avais pu te quitter, et si la volonté ne m’était venue de chercher dans ces maux leur remède. Je le connais : tout mal est dans l’esclavage. Il faut donner à la femme l’indépendance par le travail.

Ne voudras-tu pas m’aider, cher et noble ami, à