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revêtit pendant son voyage en Suisse l’habit masculin. « Cet habit, dit-elle en terminant, sous lequel j’ai pu vérifier la justice des accusations de ma sœur, et joindre aux leçons de sa cruelle expérience l’amertume de mes dégoûts. »

Sur tant d’émotions intimes, sur d’aussi graves problèmes, agités par un être si cher, Paul avait mille choses à dire, dont son cœur plein débordait. Mais cette dernière phrase, qui résumait d’une manière si brève et si dure les impressions d’Aline pendant son séjour à Florence, au milieu des amis de Paolo, les souvenirs qu’elle lui remit en mémoire… cela le frappa au cœur d’une terreur secrète et le rendit muet. C’était près de cette jeune fille, c’était sous ses yeux, qu’il avait aimé Rosina !…

Favre, apportant la lampe allumée, entrait. Paul quitta brusquement la chambre.

Au dehors, la nuit étoilée étincelait sous ses voiles. Baignés de molles lueurs entrecoupées d’ombres, les monts assoupis revêtaient des formes fantastiques ; au loin, le torrent glissait, jetant sa note éternelle. Plus transparente et plus vive à ces hauteurs, l’atmosphère livrait aux regards un demi-lointain plein de mystère et de poésie ; ce n’était partout que splendeur et calme, et toute âme accessible à ces influences en eût été pénétrée ; mais Paul apportait au sein de ce grand repos un trouble profond.

Il venait de comprendre au récit d’Aline la vraie distance qui les séparait, elle, vierge d’âme et de corps, esprit pur, austère, qui, sans autre atteinte qu’une amère tristesse, avait traversé cette orgie brutale et immonde que les hommes appellent leur