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ment cambré, qui rappelle par la pureté des lignes les modèles antiques, mais assurément Diane chasseresse plutôt qu’Endymion ou l’Antinoüs.

Un frémissement parcourut Paul des pieds à la tête. À demi défaillant sous le soupçon qui venait enfin de se formuler nettement dans son esprit, il porta les yeux sur le visage de son compagnon, tout rose encore de pudeur… Alors la conviction, dont les éléments germaient depuis quelque temps en lui sous mille formes confuses, se fit tout à coup par une éclatante et soudaine lumière. Il chancela ; sa main tremblante posa sur le gazon le petit pied, d’où ruisselait l’eau des neiges, et palpitant, presque foudroyé, il s’appuya, pour ne pas tomber, sur son autre main jetée en arrière.

« Paul ! s’écria le jeune blessé, qu’as-tu donc ? »

Mais la voix lui manqua sous le regard éperdu, insensé, plein d’un inexprimable délire, où éclatait, aussi clairement qu’en paroles, la joie, le triomphe, la folie, d’une telle découverte ; en face du visage transfiguré de Paul s’agenouillant aux pieds de l’être nouveau qui venait de lui apparaître. Aline se vit reconnue. L’effet de cette révélation fut double et contraire. Un cri profond et déchirant s’échappa des lèvres de la jeune fille ; une mortelle pâleur s’étendit sur son visage, et, s’appuyant contre la paroi de roches près de laquelle elle était assise, sa tête s’inclina sur sa main.

Arraché à son délire par la vue de cette douleur, Paul, en frémissant, entoura d’un de ses bras la chère créature, que dans l’habitude de son cœur il nommait encore Ali, et fit jaillir de la cascade une rosée sur ce front pâle. Aline frémit, ouvrit les yeux et les