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derrière les vieux murs en ruines

essentielles de leur peuple. Ils nous apparaissent très voisins, tellement aptes à s’assimiler nos habitudes, notre civilisation !

Ces Juives fades et blondes nous ressemblent. Ces garçonnets anémiques, aux visages effilés, qui, le samedi, délaissent les traditionnelles djellabas de cotonnade noire et se promènent très fiers de leurs costumes marins, auront vite fait de dépouiller à jamais toute orientale apparence, pour se muer en hommes d’action dans nos capitales.

Le Mellah crève de toute part, et, ne pouvant s’épandre à son gré sur le bled musulman, il déborde en Europe.

Pourquoi les Juifs regretteraient-ils un pays où ils furent des esclaves, des parias, des maudits ? Il n’y a pas longtemps encore, que tous les égouts de la ville déversaient en leur quartier des flots immondes, et que les Musulmans y faisaient jeter leurs ordures… Interdiction absolue de s’en débarrasser ! Lorsque l’amoncellement devenait trop ignoble, que les odeurs empuantissaient les rues à l’excès, une délégation d’Israélites s’en allait solliciter le pacha, humblement, et obtenait, contre une forte somme, la permission de nettoyer…

Leur existence n’était qu’une perpétuelle terreur. Toutes les révoltes, quelle qu’en fût la cause, aboutissaient à un pillage du Mellah. Car on les savait riches, malgré leur servitude, et les Juives ont une douce peau blanche…