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derrière les vieux murs en ruines

4 février.

El Mâati, le mokhazni, envoie sa fille passer la journée avec Yasmine et Kenza. Sans doute dans l’espoir qu’apitoyés par le dénuement de Rabha, nous donnerons de l’argent ou des vêtements. La petite grelotte, un mince caftan plaqué sur son corps d’oiseau. Des traces de coups, longues et bleuâtres, rayent ses jambes et ses reins.

— Qui t’a fait cela ?

— Mon père. Il m’a battue l’autre jour, répond-elle.

Rabha n’a pas peur de nous. Elle aimerait à demeurer ici, comme ces petites filles bien habillées, qui mangent à leur contentement et boivent du thé très sucré. Leurs maîtres sont généreux, ils ne ménagent rien !

S’il plaît à Dieu nous l’élèverons, elle aussi, dans notre maison.

Toute confiante, Rabha me raconte son histoire :

— Tu sais, ma mère était du Sous. Elle fut répudiée et partit. Mon père prit une autre femme, une veuve qui avait une fille. Celle qui n’a plus sa mère s’écrie : « Je suis orpheline ! » Arrive une belle-mère, elle pleure des larmes de sang… El