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derrière les vieux murs en ruines

18 janvier.

Les hurlements et la fureur mystique hantent les jours et les nuits. Nous vivons dans un cauchemar où s’agitent des êtres éperdus…

L’excitation a grandi toute la semaine à travers les maisons et les rues. Elle atteint son paroxysme aujourd’hui, fête du Mouloud, sur le passage de l’interminable et fanatique procession, qui se déroule, jusqu’au crépuscule, entre le marabout de Sidi Ben Aïssa et celui de Sidi Saïd.

Les groupes succèdent aux groupes, animés d’une même démence, clamant inlassablement le nom d’Allah. Des femmes berbères secouent, d’un mouvement spasmodique, leurs chevelures sauvages, véritables crinières de lionnes en fureur.

Des hommes au torse nu, au visage bestial, s’avancent, les bras enlacés, se prêtant un mutuel appui, comme s’ils étaient ivres. Quelques-uns agitent leurs draperies sanglantes, d’autres se brûlent avec des torches, se défoncent la tête à coups de hache, s’enfoncent dans la chair de longues épines, sans interrompre le rythme implacable qui les possède.

Le soleil tape sur les crânes en ébullition, arrache des scintillements aux bijoux, aux poi-