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derrière les vieux murs en ruines

les roses et les bleus pâles. Lella Meryem est jolie en toutes ses fantaisies, tel le rayon de soleil qui embellit ce qu’il touche. Mais elle se plaint de ne pouvoir, assez souvent, revêtir les lourds brocarts ramagés d’or et les joyaux réservés aux fêtes.

— Mes coffres en sont remplis, dit-elle, avec fierté, je puis encore assister à bien des noces sans jamais remettre la même toilette. Mon père — que Dieu le garde en sa miséricorde ! — n’avait pas rétréci avec moi !… Mouley Abdallah non plus, ajoute-t-elle. Regarde ces bracelets qu’il m’a rapportés de Fès.

Elle me passe les massifs bijoux d’or ciselé, selon le goût moderne, de ceux que l’on apprécie à leur poids. Même les sultanes du Dar Maghzen envieraient ces parures qui émeuvent à peine Lella Meryem.

On lui a tant dit qu’elle était la plus belle lune d’entre toutes les lunes ! qu’aucune étoile ne saurait briller auprès d’elle… Mouley Abdallah s’affole en la contemplant. Elle se laisse adorer sans étonnement et sans ivresse. Tout de Lella Meryem est léger, superficiel, gracieux et charmant. Son petit cœur d’oiseau ne saurait contenir une passion, Elle n’a pas plus de vices que d’amour.

Ô précieuse !

Ô chanson !

Ô petite brise parfumée !

Du bout de son doigt, enroulé de batiste, elle étale du rouge sur ses joues, attentive à faire une