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derrière les vieux murs en ruines

d’accablement, des caftans aux larges manches et de volumineux turbans.

Encore, y a-t-il, pour chacune, des traditions et des règles qui restreignent, dans les couleurs, la liberté de leur fantaisie : le « bleu geai », le vert, le noir, le « raisin sec » ne conviennent qu’aux blanches, à celles dont la chair est de lait et que le poète compare volontiers à des lunes.

Les peaux ambrées se font valoir par des roses, des « pois chiches », des « radis » et des « soleils couchants ».

Les négresses attisent leurs brûlants attraits avec la violence des rouges et des jaunes qu’exaspèrent leurs faces de nuit.

Nulle n’oserait essayer les nuances interdites à son teint par l’expérience des générations et des générations.

Lella Meryem s’indigna fort de ce beau caftan orange, dont les ramages d’argent sinuaient, à travers les plis, en éclairs acides et en arabesques délicatement grises, et que je voulais m’acheter pour des noces.

— Ô ma sœur ! tu n’y songes pas ! Les gens se moqueraient de toi en disant : « La femme du hakem ne sait pas mieux s’habiller qu’une bédouine… » À toi qu’Allah combla de ses grâces et fit plus blanche qu’un réal d’argent, il faut les teintes sombres ou tendres.

Elle me choisit un brocart jasmin salok, qui est d’un violet presque groseille, un autre vert éme-