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derrière les vieux murs en ruines

bons maîtres qui ont du bien, et pour lesquels on donnerait au besoin sa vie.

Nous quittons les souks où les esclaves, les bourgeois aux blanches draperies, les femmes du peuple emmitouflées dans leurs haïks, se pressent autour des échoppes. Les petits ânes, chargés de légumes, trottinent dans la cohue qui s’ouvre et se referme avec une inlassable patience. Parfois un notable, campé sur une mule, passe imperturbable et digne.

Les ruelles s’engourdissent alentour dans la tiédeur du soleil, plus calmes, plus solitaires par le contraste de leur bruyant voisinage…

— Veux-tu entrer chez moi ? C’est ici, me dit le mokhazni en désignant une impasse.

Avant que j’aie le temps de lui répondre, il a bondi jusqu’à une porte, à laquelle il heurte en proférant des « ouvre ! » impérieux.

La femme se dissimule derrière le battant qu’elle entrebâille, et elle prononce les formules de bienvenue. Puis elle nous précède jusqu’au patio, modeste et délabré, sur lequel donnent deux pièces tout en longueur. Mais les carreaux rougeâtres reluisent, bien lavés ; aucun linge, aucun ustensile ne traîne, les matelas très durs sont garnis de coussins, et une bouillotte fume dans un coin sur un canoun de terre.

Accroupi près de la porte, Kaddour prépare le thé avec autant de grâce et de soin que Mouley Hassan.