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derrière les vieux murs en ruines

larmes que toi et t’honorer de leur douleur ainsi que tu honores ta mère !

Ô mariée, tes pleurs disent ta pureté parfaite.

Les invitées louangent entre elles cette « aroussa » dont l’affliction peut servir d’enseignement aux fillettes qui l’entourent. Et elles félicitent Marzaka d’avoir mis tant de honte au cœur de Lella Oum Keltoum, de l’avoir si bien élevée, si merveilleusement préparée au mariage, car jamais fiancée n’a répandu plus de larmes !

Nulle n’ignore sa résistance, ni la contrainte qui la brise, mais une jeune fille dont l’hymen est célébré avec un si surprenant éclat ne doit-elle pas s’en réjouir secrètement, mesurer l’envie élogieuse des gens, jouir en son cœur des récits émerveillés qui se répéteront de génération en génération ?

Le mariage enfin, qu’il convient d’atteindre dans la tristesse, n’est-il pas le but unique d’une Musulmane, l’inconnu qui vient briser tout à coup la monotonie du temps, le moment suprême d’orgueil et de joie ?

Depuis sept jours, tant de femmes, les plus riches, les plus nobles de la ville, n’ont eu d’yeux et d’attention que pour Lella Oum Keltoum. Toutes les parures se sont étalées autour d’elle ; tous les flambeaux se sont allumés ; tous les parfums se sont épandus ; toutes les chanteuses ont détaillé sa beauté, sa pudeur et son émoi ; toutes