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derrière les vieux murs en ruines

5 avril.

Pour échapper aux raisonnements, à l’anxiété, au vertige d’horreur où nous sommes entraînés, il faut de vastes paysages joyeux, et des spectacles apaisants.

Allons au cimetière oublier la mort, et toutes les choses tragiques de ce temps.

Le cimetière est un lieu plaisant où l’on peut s’étendre à l’ombre des oliviers, les yeux éblouis par l’azur du ciel et par le vert intense de la terre. Une vie bourdonnante monte des herbes et descend des branches ; les cigognes planent, très haut ; les moucherons tournoient en brouillard léger ; l’âpre odeur des soucis relève l’arome miellé des liserons et des mauves.

Il fait chaud, il fait clair, il fait calme… L’âme se détend, se mêle aux chansons, aux parfums, aux frémissements de l’air, tiède, à tout ce qui tourbillonne, impalpable et enivré dans le soleil.

Un ruisseau coule au milieu des roseaux où le vent chante ; de jeunes hommes, à demi nus, y lavent leur linge. Ils le piétinent avec des gestes de danseurs antiques. Leurs jambes s’agitent en cadence, et, soudain, s’allongent, horizontales,