Page:Lens - Derrière les vieux murs en ruines, roman marocain, 1922.djvu/306

Cette page a été validée par deux contributeurs.
301
derrière les vieux murs en ruines

cette nuit, par quelles ruses ! aux murailles qui l’emprisonnent. Aussi ne s’étonnera-t-elle pas de la rigueur avec laquelle je les tiens baissés, clos, masquant obstinément mes yeux.

Je distingue à peine la pièce où elle nous a introduits : une chaise longue, garnie de modestes sofas, tout à fait honnête et rassurante, qu’éclairent deux cierges, verts et jaunes, en de hauts chandeliers.

La sorcière est une lourde matrone à l’air équivoque. Souvent, dans les harems, j’en ai rencontré de ces vieilles, complaisantes et détestables, habiles à insinuer la tentation.

Elles présentent des étoffes, achètent aux recluses les vêtements et les bijoux dont elles veulent se défaire, colportent les nouvelles, indiquent des remèdes, et s’entremettent surtout dans les aventures où leur malice l’emporte sur la défiance des maris.

— Nous sommes venus, dit Kaddour, comme des malfaiteurs, avec l’épouvante…

— Ne craignez rien, répond la sorcière. Par le pouvoir de ceux qui m’obéissent, nul ne s’apercevra de votre absence.

Elle s’accroupit devant un brûle-parfums, y jette quelques grains de benjoin, et se met à égrener un chapelet.

— Nous désirons, reprend Kaddour, que tu fasses venir pour nous ceux que tu as promis d’appeler.