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derrière les vieux murs en ruines

— Fais-le monter…

Kaddour accompagne un Marocain bien vêtu, à la figure blême et bouffie, au regard fuyant. Sans doute un marchand de Fès dont il a le type.

Il nous salue avec des formules obséquieuses que mon mari doit arrêter.

— Est-ce pour une affaire ? Pourquoi ne pas être venu me parler au bureau ?

Après des explications compliquées, le Marocain finit par solliciter un permis pour sortir du sucre. Il veut l’envoyer à Fès, où le bénéfice est plus fort, évidemment.

— Tu sais bien que chaque ville reçoit sa part de sucre. Si j’en laissais sortir, j’en priverais les gens d’ici.

— Ta parole est la plus grande, ô hakem !… Je te demande cinquante petits sacs, pas davantage. Il y en a tant d’autres à Meknès !

— Excuse-moi, c’est tout à fait impossible.

— Je me réfugie en ton enfant, ô hakem ! Je sais que Saïd est cher à ton cœur. Allah protège tes jours et les siens !… Quarante petits sacs seulement ?

— Assez de paroles. Je ne peux t’en laisser sortir même la moitié d’un.

Le gros marchand comprend que l’insistance est inutile. Cependant, il semble sur le point d’ajouter quelque chose… il hésite… puis se ressaisit et s’éloigne lentement.

Mais, après un instant, Kaddour revient.