l’âme musulmane. Elle touche le brocart de ma robe :
— Mesiane ! dit-elle encore.
Une idée traverse mon esprit : je ne connais pas ces dames, je ne les reverrai jamais, nulle ne se doutera de la mystification.
— Comment trouvez-vous notre fête ? leur demandé-je ?
Elles me regardent, interloquées.
— Tu parles français ?
— Un peu.
— Très bien même, presque sans accent ! s’étonne la Parisienne. Où l’as-tu appris ?
— Ma grand’mère était Française.
— Ah ! c’est donc pour cela que tu as les yeux bleus !… Comment a-t-elle épousé un Musulman ?
— Je ne sais pas, dis-je, subitement hostile.
Elles comprennent qu’il ne faut point poser certaines questions. Pourtant le désir de m’interroger les tourmente, surtout la femme de lettres, ravie d’une si rare aubaine.
— Comme tu es belle ! reprend-elle en examinant mes parures. Ces bracelets d’or sont anciens ?
— Non ! m’écrié-je avec orgueil, ils sont tout neufs !
Les Européennes échangent de petits coups d’œil ironiques. La femme de lettre exulte. C’est tout juste si elle ne dit pas : « Je noterai cela pour mes lecteurs. »