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derrière les vieux murs en ruines

venue le détruire, afin que disparût la débauche et les plaisirs lascifs.

» L’eau et les piscines existent encore, mais nul ne vient s’y purifier.

» Les chauves-souris, les chouettes, y trouvent leur refuge et l’araignée a tapissé de ses toiles légères tous les recoins.

Tel est, en la vanité de ce monde, le sort de toute superbe construction qui ne fut point faite pour honorer Allah. »

Ainsi chantait, au viiie siècle de l’hégire, le poète Aboul Abbas Ahmed ben Saïd El Cefijisi, afin d’expliquer la ruine de la première Meknès.

Ce hammam légendaire exista-t-il vraiment ? Les gens en parlent encore, mais ils ne s’accordent pas sur sa place, et plusieurs vergers revendiquent le souvenir de cette demeure fatale qui entraîna le châtiment de tout un peuple.

En réalité, la ville, trop souvent détruite par les pillards, dut abandonner sa riche et facile vallée pour s’ériger en forteresse, au sommet de la colline.

Il ne reste plus, sur les bords de « l’oued aux tortues » que le peuple industrieux des potiers. Dans les cavernes des premiers âges, ils ont monté leurs tours, très semblables à ceux que leur léguèrent les Roums.

Du pied, ils frappent en cadence un lourd plateau de bois qui s’ébranle et fait tourner la glaise complaisante à leurs doigts. Ils ont conservé les formes d’autrefois, sans rien changer, et leurs amphores au fond pointu ont encore besoin du trépied. Avec de l’eau, de la terre et du feu, trois