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derrière les vieux murs en ruines

tares de mousseline, les femmes dorment dans le désordre des pièces ; nulle ne m’appelle au passage. Meftouha la négresse me précède toute gémissante :

— Ô mon malheur ! Que je suis lasse par ce temps ! Monseigneur Ramadan me tue !

Elle ne songe même pas à me poser les mille aimables et vaines questions d’usage, auxquelles j’aurais répondu par mille autres questions, également aimables et non moins vaines. Pourtant, au moment de m’introduire chez son maître, elle interrompt ses plaintes pour me dire d’un air mystérieux :

— Ce matin, l’intendant de Si Larbi a ramené de Fès une nouvelle esclave…

— En vérité ! Comment est-elle ?

Meftouha grimace sans répondre, elle entr’ouvre la lourde porte de cèdre.

Mes yeux éblouis ne perçoivent rien tout d’abord, en la salle somptueuse et fraîche, refermée sur l’ombre comme un coffret.

Si Larbi et quelques amis gisent affalés parmi les coussins. Hadj Hafidh ronfle avec conviction, les autres s’étirent et bâillent. À travers la croisée ils surveillent les progrès de l’ombre qui, insensiblement, allonge ses arcades sur le sol.

— Encore cinq heures jusqu’au moghreh !

La conversation languit. Ils se taquinent entre eux avec des plaisanteries toujours répétées.

— Si Mohammed ! Tu sembles altéré. Veux-tu