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derrière les vieux murs en ruines

À force d’épier, elle saisit : des souris grignotent,… la brise halète contre les vitres,… un insecte grimpe au mur et retombe,… les moustiques bourdonnent.

Une chatte miaule, amoureuse. Soudain, sa plainte atroce, longue, stridente, fait palpiter le silence d’une souffrance aiguë qui s’apaise en ronronnements.

Ah !… on marche au-dessus de nous… Folie !… on croit toujours entendre des pas dans la nuit… A-t-on parlé ?… L’ombre vibre doucement. Tous les sens énervés cherchent à percevoir… Ce n’est rien… Mais voici qu’un son réel et lourd nous dresse en sursaut.

Nous courons à la terrasse : trois silhouettes se détachent sur le bleu sombre du ciel,… ce sont des femmes. L’une d’elles gémit affalée, ses compagnes essayent de la relever. En nous voyant elles font un geste d’effroi, puis elles se précipitent vers nous, suppliantes, et baisent nos pieds.

— Ô mon seigneur le hakem ! Ô Lella ! pardonne-nous ! … Par votre vie, nous ne voulions pas le mal !

— Qui êtes-vous ? Que faites-vous ici à cette heure ?

Elles ne répondent pas, elles implorent… mes yeux distinguent des visages connus.

— Saadia ! Khaddouje ?

Les femmes du tajer Ben Melih ! Je comprends