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derrière les vieux murs en ruines

costume tailleur. Mais aujourd’hui, elle revêt les caftans des Musulmanes…

Race étonnamment souple et tenace que la sienne ! Si prompte à s’adapter et qui, pourtant, à travers les pays et les siècles, sous toutes les civilisations et tous les costumes, conserve son essence : l’opiniâtre, l’indestructible, l’inaltérable âme juive.

Des violons grincent dans la cour, une fade odeur écœurante s’épand, à mesure que le patio se remplit d’invités. Ils ont gardé leurs lévites habituelles, noires, maculées de taches, et leurs foulards graisseux. Seul, le rabbin Tôbi exhibe une superbe redingote en drap blanc.

Le jeune Haroun traverse la foule au milieu d’une rumeur sympathique et vient se placer devant l’aroussa. Il a renoncé, en ce jour, au veston, aux bottes, au chapeau mou et aux cravates rutilantes, pour revêtir un costume soutaché, gris tourterelle, que recouvre une ample draperie de soie. Au sommet de son crâne bien pommadé, s’élève un étrange petit cube noir, retenu par des courroies… Comique et pénétré, Haroun baisse modestement les yeux, comme un figurant de théâtre.

Les rabbins chantent des litanies sur un air très religieux qui ressemble aux nôtres ; l’un d’eux psalmodie en hébreu une interminable prière, puis l’époux passe au doigt de sa femme un anneau d’or en disant :