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derrière les vieux murs en ruines

Et rouges les visages et les cœurs !

— Ô Allah ! murmure Lella Lbatoul, Sidi Hamou est arrivé ! Sidi Hamou ! père des flammes et du sang, le djinn redoutable, gardien des lieux brûlants !

Mes compagnes frémissent, troublées par l’évocation.

Le choc des crotales, les chants sauvages, les hurlements, atteignent la limite de l’intensité. Les fantômes ardents se démènent autour des sorcières, tout le jardin trépide.

L’énorme prêtresse frénétique se renverse d’avant en arrière, à droite, à gauche. Sa masse n’est plus qu’un mouvement désordonné. Son voile a glissé, la sebenia se détache… ronde et crépue sa tête roule sur ses épaules comme une boule.

Han ! Han ! la sorcière bondit ?
Han ! Han ! Elle se convulse extrêmement !
Han ! Han ! Han !

Tout à coup, d’un suprême élan, elle s’abat raide en arrière, et on l’emporte pâmée, tandis que l’infernale cohorte accélère sa danse en un vertigineux tourbillon.

Les voiles rouges embrasent la nuit.
Et rouges sont les suaires des Gnaoua !
Et rouges les reflets des torches !
Et rouges les visages et les cœurs !
C’est rouge sur rouge ! et rouge ! et rouge !