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derrière les vieux murs en ruines

inquiétée. Le moindre événement suscite toujours de nombreux commentaires. Et voici que les trois petites filles font irruption dans ma chambre avec une femme qui se précipite en répétant la formule consacrée :

— Je me réfugie en toi ! Je me réfugie en toi !

Je n’ai pas su assez vite me défendre de son approche. Elle embrasse mes mains, mes épaules, le bas de ma jupe…

Allons ! je suis prise… il me faudra, d’honneur, intervenir dans son cas. Il serait inadmissible que la femme du hakem se refusât aux devoirs sacrés de la protection… Sans doute !… mais c’est à moi que l’on recourt le plus volontiers, et il me faut constamment être sur mes gardes, pour échapper aux baisers solliciteurs… Yasmine et Kenza savent pourtant qu’elles ne doivent introduire personne sans mon autorisation…

Cependant la femme s’est dévoilée et je comprends leur émoi, en reconnaissant Mina au sourire niais et aux dents si longues.

Mina ne rit pas aujourd’hui, elle pleure. Elle raconte une interminable histoire compliquée, sans aucun intérêt, que j’écoute distraitement, ayant aussitôt compris qu’il s’agit d’une brouille entre Kaddour et Zeïneb.

Or, je sais Kaddour léger, prodigue, infidèle et coléreux. Je n’ignore pas non plus le caractère fantasque de sa femme, ni sa jalousie, sa nonchalance, sa coquetterie et ses paroles plus acides