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derrière les vieux murs en ruines

basse, tout en faisant griller des saucisses de mouton sur un canoun. Elles n’interrompent leurs commérages que pour s’approcher de Zohor et elles la fatiguent de paroles compatissantes… puis elles retournent à leur cuisine et à leurs histoires…

Elles ont préconisé d’inutiles remèdes, Allah seul donne le soulagement ! Une patte de hérisson, suspendue parmi les amulettes au caftan de la malade, n’empêche pas la fièvre de monter.

— Pourquoi n’appelez-vous pas la toubiba ? demandé-je.

— Ce qui est écrit est écrit, répond l’esclave. Nul n’arrêtera le destin qui doit s’accomplir.

— Sans doute, mais Dieu permet qu’on s’adresse à ceux qui savent.

— Nos vieilles savent, elles aussi.

— Comment sauraient-elles, puisqu’elles n’ont pas étudié ?

— Certaines choses ne s’apprennent point dans les livres… Écoute : « C’était à l’époque ancienne, des vieilles voulurent prendre le diable…

» — Que ferons-nous, dirent-elles, pour l’attirer ?…

» Elles amenèrent dix femmes qui s’égratignèrent, et vint le diable.

» — Qu’avez-vous ?

» — Le diable est mort !

» — Par ma tête ! je suis le diable !

» — Tu mens.