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derrière les vieux murs en ruines

afin de pouvoir faire les prières rituelles en quelque lieu qu’ils soient. Ils sirotent le thé à la menthe, ou boivent une gorgée d’eau dans une coupe de verre qu’ils se passent… et ils discutent, avec une béate satisfaction, sur des questions absurdes pour lesquelles ils font étalage de science et de raisonnement.

Je vais saluer Zohor, la femme de notre hôte Si Thami. Elle est toujours installée au rez-de-chaussée, dans une longue chambre qui donne sur le patio. Des cotonnades à ramages garnissent les sofas. Les coussins s’arrondissent ou s’allongent sous leurs housses de mousseline. Ils ne sont point de soie, mais de toile brodée à chaque extrémité en teintes monochromes. Aucun luxe n’apparaît dans la maison ; tout y est simple, convenable et propre. Une vieille esclave aide aux soins du ménage ; elle éleva Si Thami et le vénère. À présent les enfants du maître l’appellent Dada.

Zohor fait, pour m’accueillir, un grand effort d’amabilité, car elle est naturellement indolente. Sa vie glisse, insipide et monotone, comme l’huile qui coule sans bruit. Après les premières formules de politesse, nous nous taisons… Elle ne s’intéresse à rien de moi, ni de personne ; elle parle peu, ne monte pas aux terrasses et ne s’impatiente jamais. C’est l’épouse admirable.

Son mari la traite avec une douceur hautaine empreinte de mépris.