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derrière les vieux murs en ruines

— Moi, moi ! qui t’ai rendu honorable !

— Tu n’étais qu’une vaurienne, tu tournais parmi les jeunes gens.

— Ô mon malheur ! Moi qui étais une vierge bien gardée ! qui lui ai donné la considération ! Il demandait l’aumône, ou « qui veut m’embaucher ? » C’est moi qui l’ai fait sortir, avec un selham et des caftans propres, devant les gens !

— Ô fille de l’âne, cet autre ! Si tu m’as fait des vêtements, c’est moi qui les ai payés ! et tu m’as dérobé du fil et des galons !… où est allé mon salaire ? Ce que je reçois je te le donne.

— Oui, tu vas le porter aux courtisanes de Sidi Nojjar, et tu me laisses en haillons !

— Toi pécheresse ! tu me voles. Tu as envoyé à ta mère ! C’est de moi que tu habilles tes parents. C’est de moi que tu fais tes bracelets. Même la farine, en mon absence, tu m’en soustrais pour la revendre !… Va chercher ce chien qui est ton oncle pour que je m’arrange avec lui.

— Qu’il maudisse le tien ! Je suffis seule à ma défense. Une poule n’a pas peur de toi ! Chapon !

À cette injure trop cinglante l’homme tressaille, il pousse une sorte de rauque hurlement et saisit Zeïneb par les cheveux d’où la sebenia glisse. De son bras maigre et musclé, de son poing nerveux, il frappe au hasard, sur le nez, sur les joues, sur les seins.

Zeïneb se tord en criant, elle se dresse, telle une