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derrière les vieux murs en ruines

des Mille et Une Nuits, sont d’une incomparable somptuosité. En nulle autre demeure, je ne vis une décoration si luxueuse, des tapis si épais, des sofas si moelleux, ni pareille abondance de coussins… L’air est embaumé par les vapeurs légères et précieuses qui s’échappent des brûle-parfums ; des esclaves nous aspergent d’eau de rose, avec les mrechs d’argent au col effilé ; d’autres, agitant devant nous des mouchoirs de soie, chassent d’invisibles mouches…

Indolent et majestueux, le Chérif jouit de notre admiration, à laquelle nous savons, comme il sied, donner un tour flatteur, mais discret.

— Oui, nous dit-il, cette demeure est agréable… j’en ai bien d’autres à Fès, à Tanger, à Marrakech, cent fois plus belles, où vous serez mes hôtes un jour, s’il plaît à Dieu !…

Son orgueil est immense et magnifique. Il rivalise de faste avec le Sultan, son cousin, qu’il surpasse par la largesse de son hospitalité et l’éclat de son train.

Chacun se souvient encore du brigandage de ses ancêtres toujours en dissidence, et dont Mouley Abder Rahman[1] ne se concilia l’amitié qu’en accordant sa fille, Lella Aïcha Mbarka, au père de notre hôte.

— C’était un homme ! nous dit-il, un guerrier valeureux que nul n’a pu vaincre… Nous ne

  1. Sultan contemporain de Louis-Philippe.