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vacance est prochaine, n’est-ce point faire naître en son esprit l’espoir de l’obtenir et susciter ainsi les haines et les colères de ses compétiteurs ? C’est là tout le thème de cette bataille de sept années qui va se livrer autour du trône aboli, bataille acharnée, abominable, où sombrera la Révolution.

Aux débuts de la Convention, les camps se dessinent ; ils sont de force inégale : Robespierre, premier élu de la capitale, a pour lui la députation de Paris, Marat, Danton, Collot d’Herbois, Billaud-Varenne, toute la Montagne ; ainsi surnommera-t-on son armée ; ses adversaires, plus nombreux, ont pour troupe d’élite la brillante phalange de la Gironde, avec Vergniaud, Brissot, Buzot, Guadet, Louvet, Barbaroux, et c’est elle qui engage le duel ; les haines, plus âcres à chaque reprise, crèvent en invectives, en termes de mépris, en menaces d’égorgement.

Sagaces et éloquents, les Girondins piquent leur ennemi au point sensible ; fouetté par leurs sarcasmes dédaigneux, Robespierre, têtu et rageur, s’irrite, proteste, se cabre, chicane ; son genre est l’interminable homélie où il exalte sa vertu, son dévouement à la cause du peuple, et que hachent les cris À l’ordre ! Abrégez ! Concluez donc ! Frémissant, il regagne sa place sous les murmures, reparaît à la tribune, s’y cramponne dans la tempête[1]. Nul, dans cette Convention en majorité modérée, nul ne le juge encore redoutable : il le devient à l’époque du procès du Roi, dont, avec opiniâtreté, il réclame

  1. Moniteur, réimpression, XIV, pp. 338, 340, 651, 656, etc.