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des biens ecclésiastiques… » Cet inconnu était Robespierre. Son apostrophe souleva un grondement, d’approbation chez quelques-uns, de blâme chez beaucoup d’autres : on en était encore aux discussions courtoises et l’intervention de ce malappris faisait scandale[1]. Elle lui nuisit plus qu’elle ne le mit en valeur ; quelques semaines plus tard, las de ne pas être écouté, ayant réclamé que chacun, « sans crainte de murmures, puisse offrir à l’Assemblée le tribut de ses opinions », il fut interrompu par une tempête de cris : À l’ordre ! À l’ordre ! et obligé de quitter la tribune[2]. Tout autre que lui aurait perdu courage ; il s’obstina. Le voici, en octobre, qui « fatigue » de nouveau ses collègues : il s’agit d’une formule de promulgation des lois : il ne veut plus du traditionnel : « tel est notre bon plaisir », et il propose : « Peuple, voici la loi que vos représentants ont faite : qu’elle soit inviolable et sainte pour tous… » Un député gascon goguenarde : « Eh ! levons-nous ! C’est un cantique ! » Les rires éclatent et Robespierre s’effondre dans le tumulte[3].

Si l’on en croit les Mémoires d’un de ses collègues

  1. Voir différentes versions de cet incident raconté par Étienne Dumont et diversement interprété par Mgr Deramecourt, Le Clergé du diocèse d’Arras pendant la Révolution, II, 4, et par Hamel, Histoire de Robespierre, I, 107.
  2. Moniteur, réimpression, I, 391.
  3. Le Point du jour, n° 102. Le Moniteur, réimpression, II, 21-22, rend compte de l’incident en ces termes : – « M. Robespierre propose un amendement sur lequel il parle longuement au milieu du tumulte… Il fatigue l’assemblée par la rédaction d’une formule très plaisante qu’il voulait toujours lire quand on ne se taisait pas et qu’il ne lisait pas quand on faisait silence… Peuple, voici la loi… Ce commencement parut burlesque, on n’en a pas laissé lire la fin. »