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pourtant belle à Vadier d’engraisser son fameux rapport : car c’était cette femme Duchange qui avait, on se le rappelle, hébergé à Choisy la Mère de Dieu et son prophète dom Gerle : c’était par son intermédiaire que la Nouvelle Ève avait imposé à Robespierre, au dire de certains témoins, les sept dons du Saint-Esprit.

La sibylle de la rue Contrescarpe, écrouée depuis plus de deux mois à la prison du Plessis et sauvée de l’échafaud par Robespierre, qui, on l’a vu, s’était opposé à ce qu’elle passât en jugement, risquait par cela même, maintenant que son protecteur était abattu, d’être immolée comme complice du tyran. Mais, dans le grand embrassement qui suivit thermidor, Paris n’aurait pas supporté de voir traîner à la guillotine cette pauvre octogénaire et ses obscures compagnes. Car la Terreur avait pris fin subitement, non point par la volonté des thermidoriens, mais sous une irrésistible poussée de la répugnance publique. La loi du 22 prairial était abolie, le Tribunal révolutionnaire réformé ; les prisons s’ouvraient et se vidaient. Pourtant Catherine Théot et ses adeptes demeuraient détenus, Vadier ne pouvant, sans se discréditer, avouer que la grande conspiration déjouée, grâce à son flair, était une farce grotesque, au dénouement de laquelle devaient périr une trentaine d’innocents. La Mère de Dieu restait donc en prison, ne se plaignait pas et ne réclamait rien, soit que sa raison fût décidément troublée, soit plutôt qu’elle considérât comme une faveur du ciel cette captivité conforme à ses prophéties. Elle avait prédit, en effet, que « le grand