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de 2.000 francs que Charlotte toucha jusqu’à sa mort, survenue en 1834. C’était, dans ses dernières années, une vieille personne « bien conservée, se tenant très droite, vêtue à peu près comme sous le Directoire, sans aucun luxe, mais d’une propreté recherchée. Elle parlait peu, avec gravité[1]… » Elle habitait, toujours sous le nom de Madame Carrault, le quartier perdu du Jardin des plantes. À sa vente après décès, vente qui produisit 328 francs, un portrait de Robespierre fut estimé 40 sous ; un amateur paya 20 sous le portrait de l’Impératrice Joséphine[2].

Que devaient-ils éprouver, les survivants de l’affreuse épopée, lorsque vieillis, cassés, revenus de leurs rêves, obligés de cacher leur nom, le hasard d’une rencontre dans Paris les mettait inopinément en présence ? Si Charlotte revit, par exemple, – ne fût-ce que dans le cortège d’une des fêtes impériales, – Fouché devenu duc d’Otrante, coiffé de plumes et cravaté de décorations, ne songea-t-elle pas au temps où il lui faisait la cour et lui proposait le mariage ? Ne croisa-t-elle jamais, dans les rues, Éléonore ou le vieux Duplay auxquels elle ne pardonnait pas, ou simplement un ancien familier du menuisier, tel que Taschereau qui, en 1823, âgé de 81 ans, vivait solitaire dans un appartement mesquin du quai des Orfèvres ; la police le surveillait comme « ancien secrétaire de Robespierre »

  1. Jules Simon, Mon petit journal. Le Temps du 4 avril 1890. Je pense que les souvenirs de Jules Simon ont pu se trouver en défaut, et que la personne propre et grave qu’il vit chez Philippe Le Bas était non point Charlotte Robespierre, mais Éléonore Duplay. Charlotte Robespierre n’était pas reçue chez les Le Bas.
  2. Archives de l’étude de Me Dauchez, notaire à Paris.