« Le peuple serait bien heureux s’il n’avait pas tant d’amis ! »
La fin tragique a été contée mille fois : le transport sur un fauteuil[1], depuis les Tuileries jusqu’à la Conciergerie ; un enfant qui sortait de l’école rencontra sur le Pont-Neuf l’effrayant cortège : les porteurs, pour souffler, avaient déposé leur fardeau à l’entrée du quai des Lunettes, vis-à-vis l’esplanade où se trouve la statue d’Henri IV. La foule huait le blessé qui, la tête enveloppée d’une serviette tachée de sang, à chacune des vociférations, tournait les yeux vers l’endroit d’où partaient les cris et y répondait par un haussement d’épaules[2]. À la vieille prison, où son entrée apportait l’espérance et le salut, on le jeta dans un cachot en attendant le jugement ; « les guichetiers le foulaient aux pieds[3] ». Il parut se réveiller d’un long rêve[4] ; fit signe, dit-on, qu’il voulait écrire ; un geôlier riposta par un sarcasme[5]. Quelle confidence aurait-il faite ? Quel secret tenait-il à révéler ? Voulait-il gagner du temps, maudire une dernière fois ses ennemis, ou, qui sait ? implorer l’absolution d’un prêtre ?…
Au tribunal, l’audience fut dramatique mais courte. On n’avait encore sous la main que vingt-deux des conjurés ; tous étant hors la loi, il suffisait