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rassemblement de braillards ; des délégués de la Commune délivrent les détenus : Élisabeth voit de loin sortir son mari ; il se rend à l’Hôtel de ville où on l’appelle. Il prend le bras d’Élisabeth, la réconforte, l’exhorte à rentrer chez eux… Tout en marchant, « il lui fait mille recommandations au sujet de leur petit Philippe qui vient de naître : – « Nourris-le de ton lait ; inspire-lui l’amour de la Patrie ; dis-lui bien que son père est mort pour elle… » Il était ferme et sombre ; elle pleurait, se serrant contre lui, sanglotant à chaque adieu de son bien-aimé. Enfin, par la rue du Martroi, ils arrivent à la place de Grève ; un dernier baiser ; « Vis pour notre fils ; inspire-lui de nobles sentiments, tu en es digne… Adieu, mon Élisabeth ! Adieu[1]… ». Il s’arracha, gravit les marches du perron, et disparut dans la cohue qui obstruait l’entrée de la Maison commune. Elle dut rester longtemps[2], parmi les canons et les chevaux des troupes amassées devant le vieux palais municipal qu’illuminait, comme aux jours de fête, un cordon de lampions fumant sur la corniche du premier étage[3]. Avec son étroite porte centrale, ses deux grandes arches béantes sous les gros pavillons à hautes toitures chargées de monumentales

  1. Récit de madame Le Bas, Stéphane Pol, ouvrage cité, 138.
  2. D’après son récit, rapproché des documents officiels, c’est vers neuf heures et demie du soir, – au plus tard dix heures, – que se place cette séparation ; or c’est seulement vers minuit que madame Le Bas reprit le chemin de sa maison puisque, en revenant par les quais, elle rencontra les conventionnels à cheval, parcourant les rues pour proclamer la mise hors la loi des insurgés.
  3. Déclaration de Brochard, concierge de la Maison commune : – « À dix heures on m’a ordonné de mettre des lampions pour éclairer la place. » 2e rapport de Courtois, 201.