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Marchez ! Sauvez encore la liberté[1] !  » Dans le tumulte des bravos, on vote l’exclusion de tous les députés qui ont repoussé l’impression du discours : deux sont là, Collot et Billaud ; on se jette sur eux, on les arrache de leur banc. « À la guillotine ! » Ils sont houspillés, frappés, poussés dehors par les épaules. Fumants de fureur, ils regagnent le Comité de salut public. Dans la chambre aux colonnes, leurs collègues sont réunis en séance secrète ; quelques lampes, des quinquets blancs rechampis d’or, éclairent les tables. Il est minuit, chacun travaille en silence. Carnot, à l’écart, étudie des plans. Sur un bureau isolé, Saint-Just écrit ; sa présence gêne les autres, qui auraient des mesures à prendre dans la prévision du lendemain, gros d’orage. En voyant entrer Collot, soufflant de colère, et Billaud, blême de rage, Saint-Just les interpelle du ton le plus calme, narquois, impénétrable : « Que se passe-t-il aux Jacobins ? » Collot arpente à grands pas le tapis, comme pour se calmer. Tout à coup, il se précipite sur le « morveux », lui saisit le bras : « Tu rédiges notre acte d’accusation ? » Saint-Just, interdit, balbutie. Collot le secoue, répétant : « Tu rédiges notre acte d’accusation ? – Eh bien ! oui, Collot, tu ne te trompes pas, j’écris ton acte d’accusation. » Et, se tournant vers Carnot : « Tu n’y es pas oublié non plus. » Une lutte s’engage. Va-t-on arrêter ce révolté ? Il n’a pas le droit de parler à la Convention sans avoir soumis son rapport au Comité ; qu’il en donne lecture, on verra… Il s’y engage, se remet à écrire,

  1. Buchez et Roux, Histoire parlementaire.