Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/294

Cette page n’a pas encore été corrigée

en leur compagnie, la même promenade, et s’était montré joyeux au point de donner la chasse aux hannetons, comme un écolier débridé[1]. Quand l’heure vint de rentrer en ville pour se rendre aux Jacobins, le jour baissait ; Maximilien s’arrêta pour contempler le coucher du soleil. C’était un de ces beaux soirs du torride été de l’an II. Le ciel, au-dessus des collines de Chaillot, s’étendait très pur, tout d’or et de pourpre. Éléonore Duplay voulut y voir un présage : « C’est du beau temps pour demain », fit-elle[2].

Aux Jacobins, ça sent la poudre. L’église où se tient le club est bondée. Robespierre y est accueilli par « des acclamations effrénées[3] ». On sait les affronts que lui a infligés la Convention ; on jure de le venger, de vaincre ou de périr avec lui. Il donne lecture de son discours, écouté avec des trépignements d’enthousiasme. Quand il a terminé, il impose silence aux applaudissements et, du ton d’un homme harassé de la vie : « Ce discours, dit-il, est mon testament de mort. La ligue des méchants est si forte que je ne puis espérer lui échapper. Je succombe sans regrets ; je vous laisse ma mémoire et vous la défendrez[4]. » Aux cris de l’assistance, à l’émotion qui la soulève, il discerne de quelle force il dispose et lance un appel à l’insurrection : « Délivrez la Convention des scélérats qui l’oppriment !…

  1. Renseignement fourni à E. Hamel par le docteur Duplay, fils de Simon.
  2. Esquiros, Histoire des Montagnards.
  3. Toulougeon, Histoire de France depuis la Révolution, IV, 256, cité par Aulard, Société des Jacobins, VI, 287.
  4. Buchez et Roux, Histoire parlementaire, XXXIV, 2.