Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/29

Cette page n’a pas encore été corrigée

émigration, sous un pseudonyme, une Vie de Robespierre, partiale comme un réquisitoire. Il nous montre le laborieux enfant « infatué de sa propre excellence », et se tenant à l’écart de ses camarades ; « souvent, pendant les récréations particulières qui se prenaient dans les salles d’études, on le laissait seul et il avait la constance de rester ainsi des heures entières », affectant « de se suffire à lui-même » et préférant aux divertissements tapageurs « les sombres rêveries et les promenades solitaires[1] ».

– « Si, dans sa classe, il était nommé à la première place, il allait s’y asseoir sans empressement et comme au seul endroit qui convînt à ses talents. » – « Il parlait peu, ne le faisant que quand on semblait l’écouter, et toujours d’un ton décisif[2]. » Peut-être cette arrogance dissimulait-elle la honte qu’il éprouvait de sa pauvreté. Qui sait si le pauvre abandonné ne souffre point de n’être pas « comme les autres » ; s’il ne rougit pas de ses habits déchirés et de ses souliers éculés ? Personne n’y pense, que lui, parce qu’il redoute les affronts.

Bien que le collège hébergeât un très grand nombre de boursiers, – 600, dit-on, – si Robespierre était un des plus laborieux, il était aussi l’un des plus besoigneux : les grands-parents Carrault pensaient avoir « fait leur part » ; ses deux bonnes tantes d’Arras étaient trop pauvres pour lui envoyer quelque subside ; elles devaient même renoncer à garder chez elles leurs nièces, Charlotte et Françoise, dont l’entretien devenait une trop lourde charge ; elles obtinrent pour les deux fillettes, –

  1. La Vie de Maximilien Robespierre. Arras, chez Thery, 1850. Chapitres I et II, passim.
  2. La Vie de Maximilien Robespierre. Arras, chez Thery, 1850. Chapitres I et II, passim.