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ans, encore qu’il se flattât de ne point le quitter d’un pas et de coucher même près de lui.

Les banquets avaient lieu, soit chez Fauvelle, bien que, depuis la mort de Danton, il eût mis en vente sa maison, soit chez Vaugeois où Robespierre passait quelquefois la nuit : le fils du citoyen Lebègue l’y vit un matin, « venant de se lever et se chauffant près du feu ». En pareil cas, l’ex-cuisinier Louveau était commandé pour faire le dîner ; on lavait la rue pour que l’illustre invité ne fût pas incommodé par la mauvaise odeur et même on avait apporté des orangers tirés des serres du château, afin de donner bon air à la maison. Les repas étaient bruyants. Didiée qui, lui non plus, ne méprisait pas les bons vins[1], vantait, après boire, son inflexibilité au Tribunal : « Il n’avait jamais voté que pour la mort », et Fouquier-Tinville, toujours arrangeant, soufflait à Vaugeois, pour le remercier de sa plantureuse hospitalité : « Si quelqu’un te déplaît dans ta commune, tu n’as qu’à me l’envoyer[2]. » – « On n’entendait parler que de têtes qu’il fallait couper », disait plus tard un nommé Piot.

Révélations déroutantes où se modifie la traditionnelle figure de Robespierre, ennemi de la table et du bruit, se plaisant à promener seul ses sombres rêveries. Un de ses contemporains, historien pénétrant, discernait que, sur la fin de sa tumultueuse carrière, Maximilien, « énervé, désabusé », se livrait « à des vices nouveaux, étrangers à son tempérament », nés du « trouble intolérable » de son âme et

  1. Archives nationales, F7 477541. « Didiée n’était pas exempt d’ivrognerie. »
  2. Archives nationales, W 500. Déclaration de Jacques Nourry.