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à se faire », il s’assurait astucieusement le concours de séides d’autant plus sûrs que, « d’un mot, il pouvait les placer sous le glaive[1] ». Les contemporains s’en sont tenus, pour la plupart, à ces généralités et s’il est malaisé de déterminer aujourd’hui le contingent de cette méprisable cohorte, il est plus difficile encore de comprendre comment Robespierre, si vaniteux, si distant, apologiste de la vertu, infatué de son éducation et de son mérite, a pu se plier à de tels compagnonnages et associer à sa partie de si grossiers partenaires. Peut-être son maladif besoin de domination, exaspéré par l’aversion que lui portaient ses collègues, trouvait-il à se satisfaire pleinement au commandement de cette phalange de flibustiers, momentanément dociles et soumis dans l’expectative des grands profits imminents.

On voit, dans une vitrine du Musée des Archives, une liste d’une centaine de noms, griffonnée de la main de Robespierre, ayant pour titre : Patriotes ayant des talents plus ou moins. La plupart de ces noms ne rappellent rien aux visiteurs du palais Soubise ; leur nomenclature présente un grand intérêt cependant, car c’est dans ce répertoire que puisait Maximilien pour fournir de fonctionnaires à lui dévoués les administrations et les tribunaux. Certains, par son crédit, furent vite et bien nantis : à côté des Hermann, des Payan, la majorité des patriotes inscrits là sont des inconnus : ouvriers, petits commerçants, artisans, paysans même ; mais tous doués d’éminents mérites, évidemment, car

  1. Courrier républicain, n° 274, 15 thermidor an II, pp. 255-256.