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l’eût désarçonné : il n’avait pas assisté, on l’a dit, à la séance ; mais il alla le soir au Comité de salut public ; l’accusateur Fouquier-Tinville, à qui Vadier s’était hâté d’envoyer le décret rendu, pour que l’exécution ne traînât pas, y arriva, lui aussi, vers neuf heures, ainsi qu’il faisait chaque soir, sa fournée quotidienne expédiée. Il apportait les pièces de l’affaire Théot et venait prendre les ordres pour le lendemain. Dans l’antichambre, il rencontra Dumas, président de son tribunal ; le Comité tenait séance, et nul, d’après le règlement formel, ne devait le déranger dans ses travaux ; mais on faisait exception pour Dumas et pour Fouquier, acolytes indispensables. Ils pénétrèrent donc dans la salle des délibérations et l’accusateur public déposa les pièces sur le bureau. Robespierre s’en empara et se mit à les lire, ce que voyant, tous ses collègues, peu désireux de recevoir les premiers éclats de sa colère, s’esquivèrent l’un après l’autre, le laissant seul avec Dumas et Fouquier. Ayant feuilleté la liasse, Maximilien déclara l’affaire inepte et ordonna de n’y pas donner suite. Fouquier observa respectueusement que le décret lui imposait l’obligation de mettre en jugement les accusés ; Robespierre le fit taire et garda les papiers[1]. Fouquier courut au Comité de sûreté générale qui siégeait à l’autre extrémité du château des Tuileries ; on l’y attendait pour régler la mise en scène de l’exécution de la vieille Théot et de ses adeptes : ce fut une grande déception, quand on apprit qu’elle était contremandée. « Pourquoi ? – IL, IL, IL s’y oppose », fit-il du ton

  1. Déclaration de Fouquier-Tinville devant la Convention. Séance du 21 thermidor an II. Moniteur, réimpression, XXI, 438.