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Quel était ce prophète Élie ? Il est difficile de le démêler parmi la foule d’illuminés de toutes classes et de tous rangs englobés dans l’état-major de Catherine Théot, suivant le caprice des policiers. Peut-être doit-on identifier ce personnage avec un certain Pierre Guillaume Ducy, âgé de vingt-sept ans, étudiant en médecine, qui avait fondé chez lui, rue de la Tour, dans la section du Temple, une petite église assez semblable à celle de la rue Contrescarpe. À la fin de prairial, un habitant de Nanterre, nommé Aumont, se promenant au Mont-Valérien, remarqua trois individus dont l’allure lui parut suspecte : l’un d’eux tenait à la main un livre et, tout en marchant, faisait aux autres la lecture à haute voix ; deux femmes, dont l’une était fort jolie, s’étaient mêlées aux auditeurs. Aumont s’approcha du groupe de ces promeneurs et leur demanda pourquoi ils étaient là : « Nous aurons bientôt fini », répondit l’un d’eux. Il ne faut pas oublier que la loi du 22 prairial mettait au nombre des vertus civiques l’espionnage et la dénonciation. Aumont patienta quelque temps, puis, voyant que la lecture ne se terminait point, il arracha le volume des mains du lecteur et intima l’ordre à toute la bande de venir s’expliquer devant le Comité de surveillance de Nanterre. Les femmes s’esquivèrent ; mais les trois hommes suivirent docilement : soumission singulière qui donnerait à supposer qu’ils appartenaient à la secte placide des quakers. À Nanterre, ils déclinèrent leurs noms et qualités : l’un était Ducy et paraissait « très exalté » ; on tira de ses poches un cahier de notes incompréhensibles, un scapulaire, un livre de messe et deux crucifix. Ses compagnons