Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/204

Cette page n’a pas encore été corrigée

Vadier, Voulland, il est impossible d’y consentir[1]. »

Le 23, comme Robespierre est absent de la séance, Bourdon de l’Oise, qui a des raisons de se croire visé, se fait l’écho des transes unanimes : – « Décrétons, dit-il, que les représentants du peuple arrêtés ne pourront être traduits au tribunal que quand la Convention aura porté elle-même le décret d’accusation. » Merlin, de Douai, présente un considérant dans ce sens, affirmant le droit inaliénable de l’Assemblée de mettre seule ses membres en jugement[2]. Sa proposition est aussitôt adoptée. Cela rassure un peu : mais, le lendemain, le terrible maître est là, ainsi que son compère Couthon : celui-ci, doucereux, attristé, proteste courtoisement contre « les calomnies » de la veille : menacer la Convention ! tenter de l’asservir ! Quelle indignité ! Seul un mauvais citoyen a pu lancer une accusation si injurieuse et si impolitique. Des applaudissements prolongés saluent ses paroles : Bourdon, le coupable, fait amende honorable : – « J’estime Couthon ; j’estime le Comité ; j’estime l’inébranlable Montagne qui a sauvé la liberté ! » Nul n’oserait, sous l’œil du despote, ne pas aduler et ne pas s’aplatir. Car Robespierre, cette fois, préside ; du haut de son fauteuil, ses grosses lunettes aux yeux, il scrute les gradins où chacun peut se croire le but de ses regards auscultants. Il couche en joue Bourdon de l’Oise, l’un de ses insulteurs de la Fête ; sans prononcer son nom, il le pique, l’éperonne, sachant

  1. Vilate, Causes secrètes de la révolution du 9 thermidor, 201.
  2. Moniteur, réimpression, XX, 699-700.