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d’hommes à lui la Commune de Paris, l’état-major de l’armée révolutionnaire, les commissions administratives, le Tribunal révolutionnaire, et « transporté la souveraineté nationale aux Jacobins, coterie criarde qui domine en influence la Convention asservie[1] ». Il est retranché dans ce club « comme dans une forteresse d’où il ne cesse de tirer sur les Comités de gouvernement[2] ». Comment le réduire ? Par où l’attaquer ? Il n’est plus temps ; qui oserait porter le premier coup est un homme mort ; et les conventionnels impuissants voient se dresser à l’horizon prochain le spectre horrifiant de la dictature, aboutissement néfaste de tant de luttes, d’efforts, de sacrifices et de deuils.

Cette opposition se réduit à des conciliabules secrets ; on vit dans une ombre de guet-apens ; Robespierre a partout des yeux et des oreilles ; il est renseigné au point qu’il semble lire les plus secrètes pensées de ses détracteurs muets. Dans trois jours échoit la date du renouvellement du Comité de salut public : il prévoit qu’un vote de surprise peut l’en exclure ; il lui importe donc d’agir vite. D’ailleurs, on attend de lui quelque chose ; beaucoup présument qu’il va clore l’ère des emprisonnements et de l’échafaud, inaugurer celle de la clémence : certains journaux insinuent respectueusement que « le peuple n’attend qu’un signe de lui pour se livrer aux doux mouvements de la fraternité[3] ». D’autres lui conseillent « de proclamer une

  1. Mémoires sur Carnot, 526.
  2. Idem, 539.
  3. Journal de Paris national, 22 prairial, p. 2126.