Page:Lenotre - Robespierre et la « Mère de Dieu », 1926.djvu/191

Cette page n’a pas encore été corrigée

roses et, s’étant mêlées à la délégation de leur section, furent menées, tambour battant, marquant le pas, jusqu’au jardin des Tuileries. Alignées militairement avec leurs compagnes, elles attendirent debout, jusqu’à onze heures : la mère, n’en pouvant plus, s’assit par terre ; sa fille en fit autant, et plusieurs femmes les imitèrent ; mais le commandant du groupe leur ordonna de se lever. Elles supplièrent qu’on les laissât se reposer sur les bancs vides placés à quelques pas ; refus brutal ; alors, au début de la Fête, l’attention de tous les chefs se portant vers l’amphithéâtre où pérorait Robespierre, elles s’esquivèrent adroitement, gagnèrent les portes du jardin, et rentrèrent chez elles, harassées et mourant de soif[1].

Ceux que l’enthousiasme soutenait résistèrent jusqu’à la fin qui fut impressionnante : après le grand chœur de Gossec, on chanta des strophes à la divinité sur l’air de La Marseillaise, et la multitude mêla ses voix à celles des artistes, juchés sur la montagne. Au sommet de la colline, les trompettes marquaient le rythme, et un chef d’orchestre battait la mesure au moyen d’un drapeau[2]. Au dernier couplet, une formidable canonnade éclata, que répercutaient les coteaux de Passy ; dociles au programme, les enfants jetèrent des fleurs vers le ciel, les vieillards bénirent les adolescents, les mères remercièrent l’Être suprême de leur fécondité, et les vierges jurèrent de n’épouser que des citoyens ayant

  1. Mémoires et souvenirs du chevalier de Pougens, continués par mademoiselle de Saint-Léon, 175 et s.
  2. Lettre de Sarrette au tapissier Aubert : – « Une flamme en taffetas très léger pour faire des signaux sur la montagne au Champ de Mars. »