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est rentré dans le néant, dit-il, ce monstre que le génie des rois avait vomi sur la France… », on s’esclaffa sans gêne ni vergogne. Les nombreux matérialistes de l’Assemblée regardaient comme une provocation cette insulte à leur opinion ; dès ce moment, le charme fut rompu ; le héros de la Fête discernait tout à coup qu’il était entouré d’ennemis, envieux de sa prépondérance et répugnant à son mysticisme.

Pourtant, la cérémonie se poursuivait suivant le plan de David : les chœurs avaient entonné la version populaire de l’hymne de Gossec et Désorgues, – celle qu’on avait répétée la veille dans les sections, – et le bon peuple était ravi de cette mélodie facile qui lui était déjà familière [1]. Le cortège s’organisait pour gagner le Champ de Mars, révolutionnairement baptisé Champ de la Réunion. Cent tambours, trois musiques militaires scandaient la marche qu’ouvrait un détachement de cavalerie précédé de ses trompettes ; puis venaient les pompiers, les canonniers, les sections, les groupes de vieillards et d’adolescents, le char rustique, un peu trop chargé d’instruments aratoires ; on avait renoncé aux « huit taureaux vigoureux » que remplaçaient autant de bœufs, placides et lents, caparaçonnés

  1. Constant Pierre reconnaît qu’il n’est point possible d’indiquer de façon certaine les morceaux de musique exécutés au cours de la Fête : il croit néanmoins que les deux versions de l’hymne de Gossec furent chantées, l’une aux Tuileries, l’autre au Champ de Mars. On exécuta également, – son titre semble l’indiquer, – un chœur : Hymne à l’Être suprême chanté par les enfants le 20 prairial, paroles de Deschamps, musique de Bruni, et d’autres strophes encore, de Chénier, celles-là, mais provisoirement anonymes pour les raisons qu’on a dites, et qui s’adaptaient à l’air de La Marseillaise. V. les ouvrages de Constant Pierre cités ci-dessus.