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quelle façon il se tire de ce pas difficile : il s’avance « un flambeau à la main » écrivent les uns[1] ; « tenant une torche allumée », selon d’autres. Le moyen de n’être pas ridicule encombré de tels accessoires ? Qu’il doit paraître petit et gauche dans ce grand ensemble ; et comment marcher ? S’il va vite, il aura l’air de courir au feu ; s’il adopte une allure lente, il fera mine d’officiant : un maître de ballet saurait seul assumer pareille tâche. Il est très vraisemblable, d’ailleurs, qu’il n’eut ni torche, ni flambeau ; certains indices permettent de présumer que Robespierre se contenta d’un geste symbolique. Ruggieri lui présenta une lance à feu ; la funeste effigie s’enflamma, dégageant une fumée empestée, et des ouvriers, grimpés sur une échelle, aidaient au miracle en arrachant par lambeaux la toile combustible[2] pour dégager au plus vite l’image de la Sagesse, qui apparut néanmoins très noircie et fort mal en point : « c’était la plus triste Sagesse que l’on eût jamais vue ; son col semblait coupé d’un coup de hache ; elle regardait strictement ses genoux[3]. » Le public, tenu à distance, acclama le prodige sur la foi du programme ; mais quand Robespierre regagna son trône de l’amphithéâtre, ses collègues l’accueillirent par des ricanements et des quolibets : « Ta sagesse est obscurcie », goguenardaient-ils. Et lorsque, reprenant la parole : « Il

  1. Durand-Maillane, Louise Fusil, etc.
  2. Mémoire des ouvrages de maçonnerie faits au jardin des Tuileries au sujet de la grande figure érigée sur le bassin… – « envoyé chercher une grande échelle pour donner du secours en cas de besoin lors de l’incendie de la toile combustible… avoir enlevé les parties de toile non consumées… », etc.
  3. Correspondance inédite du conventionnel Dizès, communiquée par M. Larguier.