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de la cérémonie, sur un tonneau ou sur une chaise, dans les carrefours et faisant répéter les passants attroupés et dociles[1]. Gossec, peu soucieux d’entendre massacrer son œuvre par ces interprètes improvisés, en avait écrit à leur usage une version très simple, très mélodique, réservant l’autre, « superbe et large composition », aux artistes expérimentés chargés d’en assurer la magistrale exécution[2].

Enfin le grand jour parut, radieux. Un soleil brillant, une brise tiède, une atmosphère douce, parfumée par les guirlandes de fleurs, par les feuillages verts qui tapissaient les maisons les plus pauvres, et, sur Paris levé dans la fraîcheur de l’aube, un de ces ciels de l’Ile-de-France, vibrant et nacré, dont nul autre ne peut égaler le charme et l’enchantement. Ce décadi, 20 prairial, 8 juin, était le dimanche de la Pentecôte, et cette coïncidence, – voulue ou fortuite, – semblait aussi d’heureux augure.

À la maison Duplay, on s’était réveillé de bonne heure. Robespierre, paré d’un frac bleu violacé que ceinturait une large écharpe tricolore, d’un gilet de piqué à pointes, d’une culotte de basin et de bas chinés, descendit à la salle à manger où la famille était réunie autour du café au lait, prête déjà à se rendre à la Fête. Élisabeth elle-même, quoique sur le point d’être mère, se promettait d’aller jusqu’au

  1. Adam, Souvenirs d’un musicien et Archives nationales, F7 4432 (dans la chemise Pièces diverses).
  2. Voir au sujet de tous ces points, et de l’obscurité qui règne sur la partie musicale de la Fête, outre les ouvrages de Constant Pierre, cités plus haut, le volume du même auteur : Musique des fêtes et cérémonies de la Révolution.